Nouveaux couples, nouvelles familles
Je vous partage ici mes notes sur la Conférence de Boris Cyrulnik
Il est beaucoup plus difficile de définir la famille aujourd’hui ; c’est devenu un espace variable avec les nouvelles formes de famille.
La proximité affective rend les relations compliquées ; c’est au sein de la famille que le poids des mots est le plus important. Ils peuvent être douloureux et les blessures sont donc faciles.
Les couples et les familles instables ne parviennent pas à travailler sur la séparation.
Les couples et les familles stables travaillent sur la séparation.
La même blessure a un destin différent selon le contexte culturel et social.
Avant, la filiation affective avait plus d’importance que la filiation biologique. Aujourd’hui, beaucoup de cultures pensent que la filiation biologique est secondaire.
La culture a valorisé la violence masculine (gladiateurs, guerriers, bagarreurs…) ; maintenant ça n’est plus le cas (ou beaucoup moins) mais c’est récent dans notre histoire.
Le père « napoléonien » représente un père très absent et la mère était donc dévouée à la famille. Les femmes de cette époque instrumentalisaient les pères qui exerçaient leur autorité paternelle en « pères fouettards » quand ils rentraient.
Aujourd’hui, les hommes ne veulent pas être des pères fouettards. Il y a un grand progrès dans la relation père/enfant… mais ça rend la séparation plus douloureuse en cas de divorce ou séparation du couple.
Chacun a sa représentation de la famille. Il y aurait 550 formes de familles différentes rien que dans la représentation « traditionnelle » de la famille !!
Le développement du bébé dans le ventre de la mère est totalement en lien avec les émotions maternelles (stress, violences, joies…) En cas de stress chronique, des substances toxiques se développent dans le cerveau du bébé. Par neuro-imagerie, on observe des dysfonctionnements cérébraux avant même la naissance. Pour autant, ce n’est pas la mère qui est coupable ! Ce sont les émotions qu’elle vit.
Et si on entoure la mère alors le bébé reprend la construction de son cerveau. On n’a même pas besoin de s’occuper du bébé. Une mère sécurisée devient une mère sécurisante. Il est donc important de s’occuper des femmes enceintes !
Des observations montrent que des bébés abandonnés dormant mal, mangeant mal pouvaient, après 24-48h, retrouver un sommeil, un appétit et des sécrétions hormonales satisfaisants quand ils ont un substitut parental sécurisant. C’est de la résilience physiologique !
Pour autant, un bébé qui vit sans altérité voit son cerveau s’atrophié en 3 semaines. Si l’abandon est trop loin, la résilience ne fonctionne pas.
Il est important que le bébé n’ait pas qu’une seule figure d’attachement. Il risque d’être pris dans un piège affectif. Il doit aimer deux figures différentes.
Le père et la mère s’occupent du bébé différemment et c’est important que l’enfant apprenne à aimer de deux façons différentes.
Bowlby dit que le système familial est le plus protecteur et permet de multiples attachements selon que la famille compte 4,6,8 personnes… L’enfant apprend les interactions très précocement et s’il a plusieurs tuteurs de développement, cela permet que si une figure est défaillante à certains moments, d’autres sont présentes.
Parler autour d’un bébé active dans son cerveau la zone des sons. S’adresser directement au bébé lui permet de transformer sa zone des sons en zone du langage.
En 2 générations, les conditions des femmes ont énormément changées. Avant, le divorce était une tragédie, maintenant, c’est très différent même si ça peut être très douloureux.
Aujourd’hui, il y a beaucoup plus de grossesses médicalisées notamment car les femmes procréent plus tardivement. Mais les femmes connaissent aussi beaucoup plus de solitude autour de leur grossesse et leur accouchement = peu ou pas de transmission d’informations dans notre culture, de l’environnement. Avant, les femmes étaient très entourées ; aujourd’hui, elles sont très autonomes et plus seules. Elles rentrent beaucoup trop vite chez elles après la naissance de leur enfant.
Les dépressions post-natales ont beaucoup augmenté et on voit aussi des jeunes mères se suicider. C’est le signe d’une désorganisation de la société. Les femmes connaissent donc une nouvelle manière d’être mère = plus âgées, plus épanouies… et plus seules.
Le burnout maternel a aussi augmenté. La mère donne les consignes au père ; la mère gouverne. Les femmes sont maintenant indépendantes de leur mari.
Il faudrait dire aux couples que jusqu’aux 3 ans de l’enfant, il faudrait mieux ne pas se séparer (âge de la parole). Les 1000 premiers jours de l’enfant sont très importants.
Les pères sont nouveaux. On ne sait pas définir qui est père aujourd’hui dans notre culture (père filial ? père affectif ?, beau-père ?…) Il y a des sociétés où sont considérés comme pères et mères tous ceux qui font partis du groupe ; ça permet à l’enfant d’accéder à des niches sensorielles multiples. Quand dans une culture, il n’y a plus de père, c’est l’état qui prend cette fonction.
Pour se sentir père, il faut s’occuper de son enfant. Il faut que le développement affectif entre l’enfant et le père puisse exister.
On voit une diminution des rapports sexuels chez les jeunes, surtout depuis la pandémie. C’est assez inattendu. Il y aurait une peur de la sexualité ? Les jeunes seraient entravés par la sexualité ? Peur de s’attacher, de perdre leur liberté, de l’asservissement ? La nouvelle valeur est le développement personnel…
Un enfant est aussi une « entrave » à la réussite professionnelle ; beaucoup de mères doivent faire un choix : s’occuper de l’enfant, reprendre le travail et laisser l’enfant à garder…
Maintenant, il peut y avoir beaucoup de beaux-pères dans la vie d’un enfant. Les repères changent et posent la question de qui fait partie de la famille ou non avec parfois une confusion des rôles, des fonctions et des places. Ca pose la question de l’inceste : peut-on parler d’inceste quand il n’y a aucun lien filial entre un beau-père et une belle-fille, un demi ou quart de frère avec une demie ou quart de sœur ?…
Quand il n’y a plus de structure familiale définie, ça ouvre les portes à l’inceste et c’est aussi un indice de désorganisation sociale. Toutes les sociétés interdisent l’inceste.
Il y a parfois confusion entre lien d’attachement et sexualité ; Boris Cyrulnik donne l’exemple d’un patient, accusé d’inceste, reçu en consultation et qui exprime : « Vous vous rendez compte ? Je suis allé en prison car j’ai fait découvrir l’amour à ma fille de 12 ans !! »
Tous les couples et toutes les familles sont nouveaux ; il faut donc tout repenser !
Est posée la question de l’hyper kinesthésie chez les enfants qui sont de plus en plus nombreux à le vivre et de plus en plus jeunes. Un élément de réponse pourrait être dans le « sprint » des parents concernant leur rythme de vie (travail, stress, horaires, organisation…) qui pourrait impacter les jeunes enfants, particulièrement les garçons. C’est remarqué dans les pays riches dont le rythme est généralement intense.
En revanche, dans les pays du Nord où les congés parentaux sont beaucoup plus longs, le rythme de travail cadré et moins stressant, on n’observe presque pas d’hyper kinesthésie.
Une étude à démontrer qu’un dollar dépensé pour la petite enfance était en moyenne 8 dollars d’économisés à l’adolescence…